Les médiums

On donne le nom de médiums à des individus prétendument dotés de facultés psychiques leur permettant de communiquer avec les morts. Ils sont généralement classés en deux catégories: les médiums à effets psychiques et les médiums à effets physiques. Cette distinction reflète les deux types fondamentaux de phénomènes psychiques ou psi: la PES (Perception Extra-Sensorielle) et la PK (PsychoKinesie). Un médium à effets psychiques est une personne dont les rapports apparents avec les morts prennent la forme d'impressions mentales obtenues, semble-t-il, par le truchement de la PES du cerveau des défunts. Un médium à effets physiques, par contre, agit selon toute vraisemblance en qualité de relais intermédiaire pour des actes de PK dont les personnes décédées sont les initiatrices. On utilise parfois l'expression «agent personnel incorporel» (API) pour désigner une personne censée continuer à vivre au-delà de la mort.

Étant donné qu'il a été prouvé que des gens ne se prétendant pas médiums possédaient des facultés de PES et de PK, il est possible que les phénomènes médiumniques soient dus entièrement aux capacités psychiques du médium sans impliquer la présence d'un quelconque API. Bien qu'il n’existe aucune certitude quant aux prétendues relations entre les médiums et les morts, la plupart des parapsychologues admettent chez certains médiums d'étonnantes facultés psi. Les médiums à effets psychiques sont moins rares que ceux à effets physiques, peut-être parce que les effets visibles de la PES sont plus faciles à obtenir que ceux de la PK.

Les médiums à effets psychiques recourent à diverses méthodes pour entrer en communication avec un API. Cependant, quelle que soit la technique employée, l'objectif principal consiste à négliger le contenu de la conscience en état de veille normal pour créer une voie d'accès à des processus mentaux généralement inconscients et probablement plus favorables à la PES que la conscience ordinaire.

Certains médiums travaillent dans un état très voisin de leur état de veille normal. Pour obtenir les impressions de leur PES, ils peuvent recourir à des mouvements musculaires inconscients, comme dans l'écriture automatique ou le maniement du tableau Oui-Ja. D'autres provoquent la création d'images mentales en regardant fixement un objet, un verre d'eau ou une boule de cristal, par exemple. Certains médiums dirigent des «cercles de développement» dans lesquels ils tentent d'enseigner la façon de développer les facultés psychiques. Ces méthodes ressemblent parfois aux procédés de méditation.

Les médiums à transe travaillent dans un état de dédoublement de leur personnalité, auquel ils parviennent d'eux-mêmes ou par l'intermédiaire d'un hypnotiseur. Ces médiums donnent fréquemment l'impression d'avoir été pris en mains -on dit qu'ils sont «possédés»- par un esprit. On constate chez eux de stupéfiants changements dans la voix, l'expression du visage et les attitudes, qui se mettent à ressembler à celles de l'esprit supposé. La plupart des médiums à transe possèdent un guide spirituel qu'on appelle « contrôle ». Il s'agit d'une prétendue entité spirituelle qui s'attache au médium et l'assiste dans la recherche de l'API avec lequel le médium ou son client désirent entrer en contact. Certains guides spirituels affirment d'ailleurs être eux-mêmes des individus décédés.

Les entités qui semblent communiquer par l'intermédiaire des médiums ne sont pas toutes des API. Selon la foi religieuse du médium, des dieux, des anges et d'autres entités extrahumaines peuvent paraître communiquer par son entremise pour guider les vivants dans les questions qui les intéressent ou donner des nouvelles du monde des esprits.

Les gens consultent les médiums pour quantité de raisons. Certains espèrent par ce moyen communiquer avec des êtres chers et s'assurer ainsi que ceux-ci continuent d'exister; d'autres désirent connaître leur avenir grâce aux prétendues facilités précognitives du médium ou de l'esprit; d'autres encore cherchent à obtenir une aide dans leurs affaires commerciales et pratiques. De temps à autre, on demande aux médiums de pratiquer un exorcisme. Il arrive, en effet que des gens se persuadent qu'une personne donnant des signes de troubles mentaux est en fait possédée par un esprit mauvais. Certains médiums affirment avoir la faculté d'identifier ces esprits. de même que ceux qui habitent soi-disant les maisons hantées. Ils peuvent également prétendre détenir le pouvoir d'exorciser ces esprits c'est-à-dire de les obliger à abandonner la personne possédée ou la maison hantée.

L'oracle de Delphes

L'Ancien Testament contient un exemple d'un personnage venu consulter un médium sur l'avenir. Une bataille étant sur le point de se déclencher entre les Philistins et les Israélites, le roi Saül se rendit auprès de la «sorcière d'Endor» afin de communiquer avec Samuel et de connaître ainsi l'issue du combat. Cette femme correspondait avec un esprit familier qui tenait apparemment le même rôle que les guides spirituels d'aujourd'hui. Samuel, nous dit-on, put ainsi prédire avec exactitude la défaite de Saül (1 Samuel XXVIII, 7-25).

Le médium, ou plutôt la succession de médiums la plus célèbre dont l'histoire fasse état est sans doute l'oracle de Delphes. Pendant plus d'un millénaire, toute une série de femmes en transes furent le pivot de cette institution religieuse d'une très grande influence. Des fidèles appartenant à toutes les couches de la société affluaient dans la cité grecque de Delphes afin d'y recueillir les conseils du dieu Apollon qui s'exprimait, pensait-on, par la bouche du médium. Cette femme, qui avait reçu le nom de Pythie, entrait en transes à la suite d'une série de cérémonies et, aux questions qu'on lui posait, répondait d'une autre voix que la sienne. On crut pendant un temps que des gaz souterrains étaient à l'origine de la transe, mais des recherches géologiques ont établi qu'ils n'avaient probablement jamais existé. Comme beaucoup de médiums actuels, la Pythie, dans son étal normal, se comportait comme tout un chacun, sans témoigner d'aucune faculté ou connaissance particulière. Dès qu'elle était possédée par le dieu, elle s'exprimait généralement par symboles et énigmes, que les prêtres devaient ensuite interpréter. Delphes ne fut d'ailleurs pas le seul lieu à posséder un oracle de ce genre. L'Antiquité classique connut plusieurs autres oracles qui remplirent des fonctions identiques. Parmi eux figurent les ventriloques, censés avoir dans le ventre un démon qui s'exprimait par leur bouche et prédisait l'avenir.

On rencontre aussi dans le monde classique certains phénomènes physiques de médiumnité. Au IVe siècle de notre ère, Jamblique fait état de lumières et d'esprits entourant le médium et de la lévitation du corps de ce dernier. Il décrit aussi des phénomènes de voix directe dans lesquels des entités spirituelles semblaient parler à une certaine distance du médium, sans emprunter les organes vocaux de celui-ci. L'exorciste juif Éléazar, lors de ses démonstrations publiques, plaçait un récipient d'eau auprès de la personne possédée; quand l'exorcisme opérait, le démon chassé se réfugiait, à la demande dÈléazar, dans le récipient, prouvant ainsi qu'il avait évacué le corps de sa victime. De même raconte-t-on, selon Apollonius de Tyane, que le démon donnait la preuve de son retrait en renversant une statue. Après quoi, le possédé «se réveillait comme du sommeil, se frottait les yeux» et revenait à un état normal.

On a pratiqué la médiumnité en tout temps et en tous lieux. Les tribus sibériennes et les colonies d'Inuits mais également les Yupiks ont leurs chamans et les tribus africaines leurs sorciers-guérisseurs, qui remplissent exactement le même rôle qu'un médium londonien, par exemple.

La première expérience de médiums connue remonte à Crésus, roi de Lydie, au VIe siècle avant J.-C. Crésus envoya des messagers à sept des oracles les plus connus avec mission de poser à chacun d'eux, un jour précis, la question suivante: «Que fait aujourd'hui le roi de Lydic?», Les messagers ignoraient la réponse et il semble qu'il n'y ait en aucune possibilité de fuite par télépathie, le roi ayant veillé par ailleurs à ce que la réponse juste ne puisse être le fait d'une coïncidence due au hasard. Au jour dit, il fit cuire un agneau et une tortue dans un chaudron en cuivre. Cinq des oracles échouèrent, un sixième arriva bien près du but. Seule la Pythie de Delphes donna la réponse exacte.

La preuve constitue également un grand sujet de préoccupation pour les parapsychologues d'aujourd'hui. On ne peut savoir si un médium possède des capacités de PES ou de PK que si celles-ci ont pu être observées sous contrôle. La plupart des travaux sérieux effectués sur les médiums datent des débuts de la Société pour la recherche psychique (S.R.P.) en Angleterre et de son homologue américaine (S.A.R.P.), qui furent fondées respectivement en 1882 et 1885. Puis l'intérêt des chercheurs pour la médiumnité s'estompa, en partie parce que certains médiums se révélèrent être des charlatans et en partie parce qu'il n'était pas possible de déterminer si les phénomènes provoqués par les médiums authentiques s'expliquaient ou non par leurs propres facultés psi, en dehors de l'aide des API. Depuis plus de cinquante ans, on a constaté un regain d'intérêt pour la recherche sur les médiums. Il est dû au fait que des méthodes sûres ont désormais été mises au point pour tester leurs facultés et que ces dernières sont susceptibles d'apporter des lumières sur la nature de la PES et de la PK, que les API entrent ou non en jeu.

Médiums à effets psychiques

Mme Leonora Piper (1857-1950) est sans doute le médium sur lequel ont été effectuées le plus de recherches dans les débuts de l'investigation psychique. La plus grande partie des travaux auxquels elle a donné lieu se situent entre 1885 et 1915 et ont imprimé un grand élan à la recherche psychique tant en Amérique, dont elle était originaire, qu'en Angleterre. Le fait qu'elle donna fréquemment des détails exacts sur des personnes défuntes fit que des détectives furent chargés de vérifier si elle ne devait pas sa connaissance à des moyens frauduleux. Mais on ne put jamais la convaincre de malhonnêteté. Elle faisait parfois ses déclarations oralement, parfois en recourant à l'écriture automatique.

Leonora Piper

Mme Piper prit conscience de ses facultés de médium vers l'âge de vingt-cinq ans, alors qu'elle était allée voir un guérisseur par l'esprit pour le traitement d'une tumeur. Au cours d'une de ses visites, elle entra en transes et, à partir de ce moment, tint chez elle des séances de spiritisme avec des parents et des amis. Peu après, le psychologue américain William James (1842- 1910) vint la voir dans l'espoir de trouver une explication rationnelle à ces phénomènes, mais il ne tarda pas à se convaincre qu'elle «possédait un pouvoir jusqu'alors inexpliqué».  

William James fut l'un des psychologues les plus écoutés de son temps et il joua également un rôle important en parapsychologie. Il participa à la fondation de la Société américaine pour la recherche psychique et, en 1894 -1895, présida aux destinées de la S.R.P. anglaise. Il présenta Mme Piper à Richard Hodgson (1855-1905), secrétaire de la Société américaine pour la recherche psychique. Hodgson, qui avait déjà réussi à confondre plusieurs faux médiums, pensait qu'il en irait de même avec Mme Piper. Mais celle-ci lui donna des renseignements détaillés et intimes sur des parents et des amis décédés de Hodgson. Il organisa alors des séances auxquelles assistaient des personnes inconnues de Mme Piper et les résultats furent les mêmes.

William James

À sa mort, Hodgson devint l'un des principaux API qui semblaient communiquer par l'intermédiaire de Mme Piper. Un jour que cette dernière recourait à l'écriture automatique, «Hodgson» écrivit, s'adressant à James: «Vous semblez croire que j'ai perdu mon équilibre...», James répondit: «Vous avez en tout cas perdu votre écriture qui, de mauvaise, est devenue pire...». Un autre participant fit remarquer ironiquement: «Il avait une écriture parfaitement belle». Hodgson répliqua: «Hum, hum! William, vous rappelez-vous que je vous avais écrit une longue lettre un jour que vous étiez malade? Vous avez dû solliciter l'aide de Margaret (la fille de James) pour la lire et vous m'avez écrit que mon écriture était détestable et que vous espériez que j'essaierais de la rendre plus lisible la prochaine fois que j'écrirais à un ami malade. Cela m'avait bien fait rire, mais j'étais désolé de vous avoir occasionné tant de peine pour en venir à bout.» Or cet incident s'était bien produit de cette façon, ainsi que le confirmèrent William et Margaret James.

Richard Hodgson

Au milieu de choses probantes, James découvrit cependant bien des inexactitudes et des illogismes, de même que «des tâtonnements et des repêchages évidents, une apparente volonté de dissimuler de fausses pistes ... et une soumission à la suggestion». En fait, c'est là une caractéristique des informations médiumniques en général. La façon dont s'exprimait James laisse supposer une «volonté de se faire passer pour», d'imiter ou de créer un personnage. Cette volonté peut se brancher sur les souvenirs des participants, voire même de gens qui ne sont pas présents à la séance et «peut-être sur quelque réservoir cosmique où sont emmagasinés les souvenirs de la terre, que ce soit ou non sous forme d'esprits». En dehors de cette «volonté de se faire passer pour», James dit: «J'ai personnellement l'impression qu'une volonté extérieure de communiquer était probablement présente, c'est-à-dire que je me prends à douter, en conséquence de tout ce que je connais sur ce genre de phénomènes, bien que l'état de rêve de Mme Piper, en dépit des pouvoirs télépathiques qu'elle possède, explique tous les résultats constatés. Mais si l'on me demande si la volonté de communiquer était celle de Hodgson ou de quelque contrefaçon de l'esprit de Hodgson, je demeure sur la réserve et attends de disposer d'autres faits, des faits dont il est possible qu'il faille cinquante ou cent ans avant que l'on puisse en tirer une conclusion sans ambiguïté».

 

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Astral 2000 - Gérard - Juillet 2021