Métapsychique et parapsychologie

Métapsychique et/ou parapsychologie ?

 

Cet extrait est tiré de la revue SYNAPSE (journal de psychiatrie et du système nerveux central),  parue en 1997. Ce long entretien avec Hubert Larcher, ancien directeur de l’IMI (et toujours membre de son Comité Directeur), est l’occasion d’une leçon d’histoire sur la distinction métapsychique/parapsychologie, leçon au cours de laquelle quelques grands noms des sciences et de la philosophie sont évoqués, ainsi que le parcours personnel du Dr. Larcher.

 

- Né à Paris le 26 juin 1921, Hubert Larcher a terminé ses études secondaires à l’Ecole des Roches et, après quelques voyages, étudié la médecine à Montpellier puis à Grenoble où il est devenu, en outre, l’élève en philosophie de Jacques Chevalier. Rescapé du camp de concentration de Mauthausen, il achève ses études de médecine à Paris tout en travaillant au Laboratoire de chimie organique de l’Ecole Polytechnique, sous la direction du professeur Pierre Baranger.

En 1951, il soutient une thèse de doctorat en médecine sur l’Introduction à l’étude de l’adaptation à la mort fonctionnelle dont il tire un livre qui sera publié en 1957 par Gallimard sous le titre Le sang peut-il vaincre la mort ? puis réédité en 1990 par Désiris sous le nouveau titre La mémoire du soleil : aux frontières de la mort avec une préface de monsieur Jean Guitton, de l’Académie française.

Médecin principal du travail du Groupement des lndustries de la Région Est de Paris de 1951 à 1969 il contribue aux activités culturelles de ce groupement, tout en exerçant d’autre part, la fonction de médecin du travail des Professions judiciaires du département de la Seine de 1951 à 1981, et en organisant les services interentreprises des médecines du travail "Jeanne d’Arc" pour le XIIIè arrondissement de Paris, et "Amena" pour Neuilly-sur-Seine.

Rédacteur en chef de la Revue métapsychique et secrétaire scientifique de l’Institut Métapsychique International de 1966 à 1990, il en a été directeur à titre bénévole de 1977 à juin 1995. Membre de la Society for Psychical Research, de l’Associazlone ltaliana di Scienca Metapsichica, de l’International Association for Psychotronic Research, de l’Alliance Mondiale des Religions, il est également membre fondateur de la Société de Thanatologie et de l’Association Centre Hospitalier et Scientifique de Selins dont il a assuré la présidence de 26 avril 1977 au 22 mars 1988 .-

 

Extrait :

 

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Bertrand Meheust : Pouvez-vous résumer rapidement en quoi consiste la métapsychique, et nous rappeler son histoire, les circonstances de sa naissance aussi bien que son développement ?

Hubert Larcher : Le mot métapsychique fut suggéré pour la première fois par M.W. Lutoslawski dans un écrit polonais : Wyklady Jagiellonskie, à Cracovie en 1902, pour désigner des notions assez différentes de celles de Charles Richet (Métapsychique, Paris, Alcan, 1922, p. 2, note (...)"). En effet, lorsque celui-ci, dans son adresse présidentielle à la Society for Psychical Research, en 1905, présenta ce mot, il fut, dit-il, unanimement accepté. Qu’entendait-il par métapsychique ? De même qu’Aristote avait intitulé son chapitre sur les grandes lois de la nature qui dépassent les choses physiques : meta ta fusica, métaphysique, de même il nomma métapsychique la science qui, dépassant les choses de la psychologie classique, étudie des faits qui "paraissent dus à des forces intelligentes inconnues", humaines ou non humaines, "en comprenant dans ces intelligences inconnues les étonnants phénomènes intellectuels de nos inconsciences". Bref, la métapsychique est, dit-il : "La seule science qui etudie des forces intelligentes".

 

D’où résulte logiquement sa distinction entre la métapsychique objective qui "mentionne, classe, analyse certains phénomènes extérieurs perceptibles à nos sens, mécaniques, physiques ou chimiques, qui ne relèvent pas des forces actuellement connues et qui paraissent avoir un caractère intelligent", et la métapsychique subjective qui étudie des phénomènes psychiques non matériels tels que la lucidité, cette mystérieuse faculté de connaissance qu’il attribue à une sensibilité dont la nature nous échappe et qu’il propose d’appeler cryptesthésie. Ces deux aspects, objectif qui étudie des forces et subjectif qui étudie des phénomènes psychiques, se retrouvent dans la définition générale que Charles Richet donne de la métapsychique : "La science qui a pour objet des phénomènes, mécaniques ou psychologiques, dus à des forces qui semblent intelligentes ou à des puissances inconnues latentes dans l’intelligence humaine ".

 

En tous temps, en tous lieux, l’homme a été étonné par ce qui est insolite, extraordinaire, mystérieux. Qu’un Instant privilégié fasse coïncider des circonstances avec ces Instances et certains verront dans cette synchronicité l’effet d’une grâce providentielle. C’est ainsi qu’aux XVIème. et XVIIème. siècles, les Anglais publient des collections de "Providences", c’est-à-dire d’événements pouvant, à leurs yeux, être considérés comme des manifestations de rétributions, de prévenances ou d’assistances divines. Dès 1657 Matthew Poole Inspire aux Platoniciens, de Cambridge, l’intention de les enregistrer de manière systématique et critique. Face au matérialisme antireligieux de Thomas Hobbes, Henry More, de 1653 à 1681, affine son esprit critique, pensant avec Joseph Glanvill que les manifestations surnaturelles ne doivent être acceptées qu’avec prudence, celles qui résisteront à l’examen pouvant avoir d’importantes conséquences sur notre conception de l’homme et de sa place dans l’univers. Cette démarche prépare et préfigure ce goût de la recherche psychique demeuré si vif à Cambridge que le Trinity College en devint le centre mondial d’où surgirent les pionniers de la Society for Psychical Research (SPR), fondée en 1882 : F. H. Myers, Gurney, Sidgwick et Hodgson. Trois Français eurent l’honneur de présider la SPR : Charles Richet en 1905, Henri Bergson en 1913 et Camille Flammarion en 1923.

 

Evoluant du "providentialisme" religieux de plus en plus critique vers une recherche psychique de plus en plus scientifique jusqu’à la fondation de la SPR, le courant platonicien de Cambridge et les recherches anglaises influencèrent les Français : en 1890, Charles Richet et le Docteur Xavier Dariex fondent les Annales des Sciences Psychiques, et en 1922 Charles Richet dédicaça son Traité de Métapsychique "à la mémoire de mes illustres amis et maîtres Sir William Crookes et Frederic Myers qui, aussi grands par le courage que par la pensée, ont tracé les premiers linéaments de cette science ". Rappelons, pour mémoire, un autre courant, celui des règles de la critique des miracles établies par Prosper Lambertini, le futur pape Benoît XIV, dans son forte : De Servorum Dei beatificatione et Beatorum canonisatione, paru en 1734. Mentionnons aussi Salomon Maimon (1753-1800), précurseur de la parapsychologie scientifique, si rationnel qu’il fut - à tort - accusé d’athéisme par ses coreligionnaires.

 

Enfin le courant spirite, né de manifestations paranormales survenues chez les sœurs Fox, à Hydesville, en 1847 ; courant qui tend à adopter une attitude scientifique vis-à-vis de ces phénomènes. Tous ces courants ont préparé le terrain à ce qu’il est convenu, actuellement, de nommer parapsychologie.

 

Bertrand Meheust: Peut-on assimiler purement et simplement, comme on le voit faire parfois, métapsychique et parapsychologie ?

 

Hubert Larcher : C’est en 1889 que l’Allemand Max Dessoir proposa les termes de parapsychologie pour "caractériser toute une région frontière encore inconnue qui sépare les états psychologiques habituels des états pathologiques", et de paraphysique pour désigner des phénomènes objectifs qui paraissent échapper aux lois de la physique classique. En France, Emile Boirac, recteur de l’académie de Dijon, correspondant de l’Institut, reprit le terme de parapsychologie qui ne fut pas retenu par ses compatriotes en raison de l’imprécision scientifique de sa définition. En 1929, Hans Bender, élève de Pierre Janet, prépara une thèse qu’il soutint en 1933 sur Les automatismes psychologigues. Devenu professeur à l’université de Fribourg en Brisgau, il fonda un organisme de recherches parapsychologiques auquel, fidèle à la définition de Max Dessoir, il donna le nom d’Institut fûr Grenzgebiete der Psychologie und Psychohygiene. En 1932, le zoologiste philosophe allemand Hans Driesch utilisa le mot parapsychologie dans le titre d’un de ses ouvrages et, depuis, il est resté utilisé dans les pays de langue allemande.

 

Aux Etats-Unis d’Amérique, à la suite de William Mc Dougall et avec son concours, le professeur Joseph Banks Rhine, en 1934, donna le nom de Parapsychology laboratory à la section de psychologie qu’il dirigeait à l’université Duke, en Caroline du Nord. En 1937, il publia les résultats statistiques de dizaines de milliers d’expériences quantitatives, vérifiés et admis par le congrès de l’Institut Américain de Statistiques Mathématiques, qui mettaient en évidence l’existence des phénomènes de clairvoyance, de télépathie, de précognition et de psychocinèse. A partir de ses travaux, publiés dans The Journal of Parapsychology, la recherche parapsychologique s’étendit rapidement à travers les Etats-Unis, et au-delà de ses frontières, si bien qu’en 1957 fut fondée la Parapsychological Association et que celle-ci fut affiliée en 1969 à l’Association Américaine pour l’Avancement des Sciences. Cependant, dès 1952, sous l’énergique présidence de Mrs Eileen J. Garrett, la Parapsychology Fondation Inc. avait encouragé des recherches scientifiques dans le monde entier et organisa de nombreux échanges : en 1953 un Colloque international de parapsychologie eu lieu à Utrecht, puis, à partir de 1954, les Entretiens de Saint-Paul-de-Vence où Mrs Garrett avait établi son quartier général européen, au Piol-Saint-Antonin. Les rapports et comptes rendus de ces rencontres furent présentés et publiés par monsieur Robert Amadou sous le titre : La science et le paranormal [paranormal, Paris, Institut Métapsychique (...)], et il en établit un bilan intitulé : La parapsychologie [parapsychologie, Paris, Denoél, 1954]. On peut donc dire que c’est, en très grande partie, grâce à Mrs Garrett que la parapsychologie d’origine allemande revint des Etats-Unis d’Amérique, auréolée de science, vers l’Europe où Monsieur Robert Amadou eut le mérite de la présenter en France. II présida avec le docteur Emilio Servadio un symposium consacré à l’étude des rapports entre psychologie et parapsychologie, à Royaumont, en 1956.

 

Le retour d’Amérique fit apparaître la parapsychologie comme une nouveauté, une "jeune" science face à la "vieille" métapsychique. Erreur historique évidente puisque la métapsychique est née en 1905, soit seize ans après la parapsychologie en 1889. Mais erreur généralisée à profusion par les media et soigneusement entretenue par certains chercheurs universitaires cherchant à se démarquer d’une confusion entre la science métapsychique que Charles Richet considérait comme une branche avancée de la physiologie et des croyances, conjectures, ou "parasciences", plus ou moins occultes ou commerciales, qui n’ont rien de scientifique. Si l’on s’en tient au sens des mots, la parapsychologie correspond à la métapsychique subjective, et la paraphysique à la métapsychique objective. Or la parapsychologie est distincte de la paraphysique. Donc la parapsychologie constitue la moitié subjective de la métapsychique. Cependant, en unifiant ces deux concepts de Max Dessoir, Charles Richet a établi le lien physiologique entre les manifestations physiques et les dispositions psychiques qui paraissent en être les sources. Dès lors, les phénomènes paraphysiques apparurent comme des produits psychocinétiques de la parapsychologie, ainsi que l’ont montré des expériences de J.B. Rhine sur la psychocinèse. On peut donc admettre aujourd’hui que la définition de la parapsychologie englobe celle de la paraphysique en disant qu’elle étudie des états psychologiques inhabituels non pathologiques ainsi que leurs effets objectifs. Elle s’approche ainsi de la définition de la métapsychique qui étudie des forces intelligentes.

 

 

 

http://www.metapsychique.org/A-propos-de-metapsychique-et-de.html

 

ASTRAL 2000 - Gérard - Juin 2016

 

 

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