Esprits frappeurs

Mots-Clés : esprits frappeurs,poltergeists,psychokinésie

Phénomènes dont les premières manifestations connues eurent lieu en Allemagne, ce qui explique l'usage, en français, du mot allemand « Poltergeist » (esprit frappeurs) pour les désigner. En 858, près de la ville de Bingen, sur le Rhin, s'étaient produites. raconte-t-on, des chutes de pierres et on avait entendu de grands bruits et des coups. On crut ces phénomènes provoqués par des esprits. Quelle qu'en fût la cause l'exorcisme se révéla inopérant. On mentionne un autre cas en 1184 au domicile d'un certain William Nott au pays de Galles; les esprits furent, cette fois encore, soupçonnés de se conduire en déments, lançant des ordures et lacérant les vêtements. En 1682, Richard Chamberlain, secrétaire de ce qui était alors la province du New Hampshire, consacra une étude à une série de chutes de pierres inexpliquées, attribuées à un «diable lance-pierres».

Les esprits frappeurs se manifestent ordinairement dans le voisinage d'une personne  précise, souvent un garçon ou une fille à l'âge de la puberté ou dans l'adolescence. En règle générale, on distingue le phénomène des esprits frappeurs de celui des revenants. Le mot revenant vient du verbe revenir, ce qui implique le retour de l'esprit d'une personne décédée à son habitat terrestre. En règle générale, les revenants ne paraissent pas dépendre d'une personne vivante en particulier mais s'attachent plutôt à un lieu précis comme une maison hantée. Il existe encore d’autres différences. Dans les manifestations d'esprits frappeurs, les désordres physiques dominent, tandis que dans les phénomènes de revenants, il s'agit surtout d'expériences hallucinatoires. Ces expériences, qui peuvent consister à voir des fantômes et à entendre des pas, sont hallucinatoires en ce sens qu'elles ne sont généralement vécues que par certaines personnes et non par d'autres. Les hallucinations vécues dans une maison hantée sont différentes de celles d'une personne souffrant de troubles mentaux par le fait qu'elles ressemblent à celles que d'autres ont connues personnellement dans la même maison ou correspondent à quelque événement précis du passé. Quand une telle correspondance existe, on parle d'hallucinations véridiques: ce sont des cas de PES (Perception Extra-Sensorielle). Lorsqu'on a tenté d'aborder le problème scientifiquement, il a été quelquefois fait appel à des médiums dans l'espoir qu’ils pourraient, grâce à leur faculté de PES, réagir aux fantômes.

Dans le cas des esprits frappeurs, il se produit souvent des déplacements et des bris quotidiens d'assiettes, de bibelots, de meubles et autres objets ménagers, alors que les incidents de cette nature sont très rares et beaucoup plus échelonnés dans le temps dans les phénomènes de revenants. Ces derniers durent ordinairement longtemps - il n'est pas rare d'entendre parler d'une maison qui a été hantée pendant plusieurs années - tandis que les désordres des esprits frappeurs sont habituellement de courte durée rarement plus de quelques mois.

Les esprits frappeurs se manifestent d'habitude dans le voisinage immédiat d'une personne vivante. Les parapsychologues inclinent à considérer ces phénomènes comme des cas de PK (PsychoKinésie).Comme ces incidents sont récurrents et se produisent d'une façon imprévue et spontanée, on les qualifie communément de cas de PKSR (PsychoKinésie Spontanée Récurrente). Cette forme de psychokinésie est en outre inconsciente car la personne qui est à son origine ignore ordinairement son rôle. Pour certains, les phénomènes de PKSR sont dus à l'action d'une entité incorporelle, comme l'esprit d'un mort ou un démon qui s'est attaché à quelque personne vivante et provoque les incidents par PK. Cependant, comme il n'existe aucune preuve de l'existence de ces esprits en dehors des phénomènes eux-mêmes, la plupart des parapsychologues sont d'avis que les phénomènes d'esprits frappeurs sont des manifestations de PK inconsciente, provoquées par la personne autour de laquelle ils se produisent.

li n'est pas rare aujourd'hui de considérer certains miracles rapportés par la Bible comme des cas possibles de PK. On est généralement surpris d'apprendre que la PK sous la forme d'un esprit frappeur, joua aussi un rôle dans l'histoire de la chrétienté, en particulier dans l'une de ses ramifications, le méthodisme. Pendant deux mois, en décembre 1716 et en janvier 1717, le presbytère d'Epworth, lieu de naissance de John Wesley (1703-1791), fut le théâtre de coups violents provenant d’un esprit frappeur. John, alors adolescent, n'eut probablement aucune part au phénomène, car il ne séjournait pas chez lui à cette époque. Sa mère, qui a noté les faits, écrit que, à partir du début décembre, des bruits étranges de coups étaient perçus dans la mansarde ou dans la chambre d'enfants, généralement par séries de trois. Le phénomène était presque toujours auditif, mais il y eut aussi quelques faits physiques. Par exemple, le loquet de la porte de la chambre à coucher de Samuel Wesley (le père de John) était fréquemment soulevé lorsqu'il était au lit et, dit-il, «j'ai été à trois reprises poussé par une force invisible, une fois contre le coin de mon bureau dans mon cabinet de travail, une autre fois contre la porte de la chambre tapissée de nattes et une troisième contre le côté droit de l'encadrement de la porte de mon bureau au moment où j'entrais». Les faits semblaient être liés à Hetty, la sœur de John, âgée de dix-neuf ans. Emily, son autre sœur, déclara: «Ces bruits ne m'ont jamais suivie comme cela a été le cas pour ma sœur Hetty. J'étais avec elle lorsque des coups ont retenti sous ses pieds; quand elle bougeait, ils la suivaient et retentissaient précisément sous ses pieds».

Les perturbations provoquées par la PKSR sont, à bien des égards, semblables aux phénomènes dus aux «médiums à effets physiques».

Un agent d'esprit frappeur peut être considéré comme un médium à effets physiques provisoire. Il est intéressant de noter que certains médiums à effets physiques ont commencé leur carrière en étant au centre de désordres provoqués par des esprits frappeurs. Le plus remarquable d'entre eux fut incontestablement D. D. HOME (1833-1886), qui pouvait apparemment provoquer la lévitation de meubles et de sa propre personne en pleine lumière. Sa carrière de médium à effets physiques débuta à l'époque où il se trouvait au cœur de coups et de déplacements d'objets dus aux esprits frappeurs.

L'esprit frappeur fut au nombre des faits inexpliqués qui incitèrent les savants et chercheurs sérieux à s'intéresser à l'étude scientifique des phénomènes psychiques. Le fait que ces manifestations se produisent spontanément en un lieu - ordinairement une maison particulière - éloigné du laboratoire expérimental a toujours fait peser un doute sur leur authenticité. Lorsque, dans les années 1940 fut publié le témoignage du Laboratoire de parapsychologie de l'université de Duke selon lequel des sujets d'expérience étaient capables d’influencer la chute de dés en dehors de tout contact direct, faisant ainsi la preuve d'une faculté qui rendrait l'esprit capable d'agir sur la matière, les esprits frappeurs furent pris plus au sérieux. Cet intérêt se renforça encore à partir du moment où l'on put démontrer l'existence d'un effet PK sur les objets en mouvement - tels que des dés qui roulent - mais non sur les objets immobiles. De toute évidence, si l'on parvenait à prouver les histoires d'esprits frappeurs, on mettrait aussi en évidence le fait que des objets immobiles entraient véritablement en mouvement. Pour cette raison, l'esprit frappeur pouvait apporter aux parapsychologues de nouvelles lumières sur la PK. L'explication par la PK était étayée par de nombreuses études antérieures de désordres provoqués par les esprits frappeurs, notamment celles dirigées par des membres de la Société pour la recherche psychique (Society for Psychical Research – SPR) de Londres, dont les enquêteurs, apparemment fort minutieux, s'étaient trouvés parfois incapables d'expliquer certains incidents en termes de tricherie, de fabulation, ou par d'autres causes normales.

Les recherches britanniques

L'un des chercheurs les plus actifs en matière d'esprits frappeurs fut Sir William Barrett (1844-1925), éminent physicien et l'un des fondateurs de la Société pour la recherche psychique. En 1877 une ferme de Derrygonnelly, en Irlande, qu'habitaient un veuf et ses cinq enfants fut le théâtre d'une série d'incidents. Les phénomènes, essentiellement des bruits de coups et des déplacements d'objets, se concentraient sur Maggie une fille de vingt ans. Un jour où elle était tranquillement couchée avec les enfants sous la surveillance de Barrou, de forts coups se firent entendre et une grosse pierre atterrit sur le lit. L'entité ou l'énergie invisible frappait sur commande : «Je lui demandai mentalement, aucun mot n'étant prononcé, de frapper un certain nombre de fois et elle obéissait. Pour éviter toute erreur ou illusion de ma part je mis les mains dans les poches de mon pardessus et je lui demandai de frapper un nombre de coups égal à celui des doigts que j'avais ouverts. Elle le fit sans se tromper. Puis, en ouvrant chaque fois un nombre différent de doigts, je répétai l'expérience à quatre reprises et chaque fois j'obtins le nombre correct de coups

Dans la plupart des cas, les incidents causés par les esprits frappeurs avaient pris fin au moment où la Société pour la recherche psychique en entendait parler, ou bien d'autres raisons rendaient impossible une étude particulière. Il y eut toutefois de fréquents témoignages de gens apparemment dignes de foi. En février et mars 1883, d'étranges bris d'objets se produisirent dans la cuisine de la maison habitée par Joseph White à Worksop dans le Nottinghamshire. Les dégâts s'aggravaient en présence d'une jeune fille psychologiquement perturbée venue rendre visite à la famille. On appela l'agent de police William Higgs et en présence de ce dernier et d'un médecin venu au chevet d'un des enfants, «On vit une cuvette s'élever lentement de l'évier. Après avoir heurté le plafond elle retomba brusquement à terre et se brisa». Les deux hommes examinèrent aussitôt les objets qui avaient bougé, mais sans rien trouver qui pût expliquer le phénomène.

Mme Best, sa fille et deux petites orphelines vivaient à Durweston, près de Blandford, lorsqu’en décembre 1894, elles commencèrent à être importunées par des coups, des raclements de pieds et, plus tard, des déplacements d'objets. Une chaussure ayant heurté la porte arrière de l'habitation, elles firent appel à un voisin, M. Newman. En présence de celui-ci, la chaussure se remit à voler et Mme Best la jeta dans le jardin. Newman raconta. «Je sortis, mis le pied dessus et dis: ‘’Je défie quiconque de faire bouger cette chaussure’’. Juste au moment où je retirai mon pied, elle se souleva dans mon dos et vint me décoiffer: il n’y avait personne derrière moi. La chaussure et mon chapeau retombèrent ensemble».

Entre novembre 1917 et décembre 1918, R. P. Jacques fit construire un abri anti-bombes dans sa maison de Folkestone, dans le Kent. Il ne fut jamais victime des obus allemands, mais devint la cible d'un esprit frappeur. Un jour, Jacques visitait l'abri après le départ du maçon et de son apprenti; il n’y avait donc personne avec lui. Sa visite terminée, il ferma la porte mais, déclara-t-il, «avant que j'aie retiré ma main de la targette, une pierre vint violemment heurter l'intérieur de la porte et, immédiatement après, trois autres se succédèrent rapidement». Plusieurs autres suivirent encore et Jacques rentra dans l'abri pour y trouver les pierres près de la porte et constater de nouveau qu'il n'y avait personne.

En août et septembre 1952, des désordres inexpliqués se produisirent au foyer de Sam Jones, un veuf habitant Runcorn, dans le Cheshire. Les faits eurent lieu dans une pièce occupée par le petit-fils de Jones et un ami. Comme le révérend W. H. Stevens était là, un soir, il posa quelques objets, dont deux livres et un jeu de patience, sur une table qui avait été particulièrement agitée. On éteignit les lumières et, tandis que Stevens se tenait près de la table, les objets se mirent «à se projeter à travers la pièce. Finalement j'entendis les deux livres traverser la salle en volant, puis je perçus le bruit des pièces du puzzle dans leur boîte. C'était ce que j’attendais et d'un seul coup j'allumai ma torche. Le jeu de patience se promenait à environ deux mètres de hauteur. Les deux garçons étaient bien enveloppés dans leurs vêtements, exactement dans la même position qu'au moment de l'extinction de la lumière».

A. R. G. Owen, chargé de cours de mathématiques et de génétique à l'université de Cambridge, a mené une enquête sur les activités d’un esprit frappeur en novembre et décembre 1960, dans le village écossais de Sauchie. De nombreux déplacements de meubles et de literie avaient été constatés autour de la personne de Virginia Campbell, fillette de onze ans, par le médecin de la famille et le pasteur de l'endroit. Il est rare que les phénomènes dus à un esprit frappeur accompagnent la personne en dehors de· son domicile. Tel était pourtant le cas de Virginia. À plusieurs reprises son institutrice, Melle Margaret Stewart, vit le couvercle du pupitre de Virginia, à l'école, se soulever et s'abaisser lentement tandis que l'enfant tenait les mains posées dessus, comme pour le maintenir baissé. Les pieds de la fillette reposaient sur le sol de telle sorte qu’il ne lui était pas possible de soulever le couvercle avec ses genoux. À une autre occasion, alors que Melle Stewart la surveillait, elle vit un pupitre inoccupé derrière Virginia bouger lentement et venir se reposer un peu en dehors de l'alignement des autres. Et un jour que l'enfant se tenait près du bureau de l'institutrice, celle-ci vit soudain la baguette du tableau noir, qui était sur sa table, se mettre à vibrer et bouger, puis tomber par terre. Le bureau lui-même se mit alors à tourner dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Melle Stewart regarda son élève, qui pleurait en disant: «Je vous assure. Mademoiselle, ce n'est pas moi».

L'un des principaux centres d'étude des poltergeists se trouve à l'université de Fribourg, en Allemagne. C’est là qu’un chercheur très en vue, le professeur de psychologie Hans Bender (1907 – 1991) est en activité. En 1952, le service de Santé publique de la ville de Neudorf, dans l'état de Bade, fait appel à Bender pour faire face à une curieuse situation qui avait pour théâtre le domicile du maire. Bender, à son arrivée, apprit que la veille, le maire, son fils et sa bru avaient vu une série de clous apparaître mystérieusement à environ 20 cm au-dessous du plafond d'une chambre à coucher, puis tomber sur le sol. Un autre fils, Bernard, âgé de treize ans était allongé sur le lit, au côté de sa mère lorsque que des clous provenaient d'une armoire de la cuisine, fermée à clé. En une autre occasion le maire avait vu un cintre monter le long d'une porte et arrivé au sommet, prendre son vol à angle droit. D'autres personnes avaient vu des objets sortir d'un mur el se déplacer à grande vitesse; lorsqu'on les avait ramassés, ils étaient chauds. Les incidents ne se produisaient qu'en présence de Bernard et cessaient lorsqu’il partait en vacances. Pour essayer de remonter à l'origine du phénomène, l'équipe de Fribourg fit passer des tests psychologiques au garçon. On détecta une forte tension en rapport avec la puberté, ainsi que des signes de frustration et d'agressivité. Bender supposa que ces tensions étaient liées au phénomène.

Le cas du «garçon de Brême» débuta en juin 1965, dans un magasin de porcelaines de cette ville où sans que l'on puisse s'expliquer pourquoi, des verres et des plats se mirent à choir des étagères pour aller se briser à terre. Pour les enquêteurs, policiers et autres, ces faits étaient inexplicables. Les désordres semblaient liés à un apprenti de quinze ans, Heiner, et cessèrent après son licenciement. Bender et d'autres membres de l'équipe de Fribourg observèrent le garçon en mars 1966. À cette époque, les bris d'objets avaient fait place au desserrage spontané des écrous que l'adolescent installait avec son nouvel employeur, un électricien. L'équipe elle-même fut le témoin de l'un de ces faits, qui cessèrent définitivement en juillet 1967.

De novembre 1967 à janvier 1968, une série de désordres se produisirent au bureau de M. Adam, juriste dans la ville de Rosenheim. (Voir article ICI ) L'agitation des tableaux au mur et des lampes au plafond, les explosions d'ampoules électriques et autres incidents étaient liés à la présence d'une employée de dix-neuf ans. Le service d'entretien de la compagnie d'électricité locale, sous la conduite du directeur adjoint P. Brunner, mena une enquête dans l'espoir de trouver à ces faits une explication plausible. On enregistra des écarts allant jusqu'à 50 ampères sur l'amplificateur de tension au moment où certains de ces incidents se produisirent. Cependant les fusibles, qui auraient dû sauter en raison de l’intensité du courant, demeuraient intacts. Bender appela alors auprès de lui deux physiciens, F. Karger et G. Zicha. Ils posèrent des instruments pour mesurer l'intensité du courant passant dans le câble de distribution du bureau ainsi que dans d'autres objets électriques. On obtint, cette fois encore, des écarts importants. Toutefois, le voltage dans les câbles de distribution demeurant constant, on ne pouvait attribuer ces écarts aux variations de courant se produisant dans la maison. Il fallut également renoncer à d 'autres explications telles que charges électrostatiques, matériel défectueux ou fraude. Les incidents ne se produisaient qu'en présence de la jeune femme. Les études psychologiques faites sur elle et sur Heiner, le garçon de Brême, établirent qu'ils possédaient l'un et l'autre des natures instables, peu aptes à tolérer la frustration. Les tensions provoquées par l'agressivité, s'accumulant rapidement et n'ayant pas d'autre moyen de se libérer, se trouvaient apparemment soulagées par l'action des esprits frappeurs…

À partir de novembre 1968 et pendant quatre mois, le domicile d'un paysan de Ickelheim fut le théâtre de coups frappés dans les fenêtres et les portes, d'envol d'objets et, fait plus étrange encore, de déplacements de pierres et autres objets qui entraient et sortaient de pièces fermées. Un jour où un prêtre était en train de bénir la maison, une pierre tomba du plafond, bien que portes et fenêtres fussent toutes fermées. Quand il la ramassa elle était chaude.

M. Adam, le juriste de Rosenheim, avait pris goût aux phénomènes d’esprits frappeurs et il alla rendre visite à la famille de Nickelheim. On lui raconta que les objets disparaissant de la maison étaient aperçus plus tard au-dehors en train de tomber sur le sol. Après avoir fermé portes et fenêtres, il sortit également. Peu après, des bouteilles apparurent en l'air, à hauteur du toit, et tombèrent en décrivant des zigzags. Parmi les objets «télé-apportés» figurait le propre manteau de Bender. Primitivement accroché dans un placard près de la cuisine, il était apparemment «sorti» -on le retrouva, en effet, dehors dans la neige- tandis que Bender s'entretenait avec la famille.

Le groupe de Bender installa alors un coffre dans lequel furent mis des objets qui avaient été déplacés antérieurement; ils espéraient que l'esprit frappeur les prendrait à nouveau pour cibles. On disposa des capteurs photoélectriques destinés à déclencher trois caméras et une lampe rouge dans le cas où l'un des objets bougerait ou sortirait de la caisse, ou si quelqu'un tentait d'accéder au coffre. À une occasion, alors que l'équipe de Fribourg se trouvait à l'extérieur avec la famille, on vit s'allumer les lampes reliées aux caméras: on découvrit qu'une statuette était passée pardessus la caisse. Les photos et les films, une fois développés, ne montrèrent rien de suspect et ne fournirent aucune indication sur la façon dont les choses avaient pu se produire.

Les incidents semblaient avoir une relation privilégiée avec Brigitte, une fillette de treize ans. Comme dans d'autres cas où un esprit frappeur s'était manifesté d'une manière apparemment authentique, on découvrit, au moment où les phénomènes commencèrent à se faire plus rares, que la personne qui se trouvait au centre des événements, en l'occurrence Brigitte, trichait. Bender trouva des empreintes digitales sur un plat dont elle affirmait qu'il avait été jeté par la fenêtre par le poltergeist.

Bender s'est pris d'un intérêt particulier pour les histoires d'objets franchissant les murs et d'autres obstacles sans laisser aucune trace. Ces pénétrations de la matière par la matière sont peut-être le plus grand défi lancé par l'esprit frappeur aux théories de la physique. Bender a émis l'hypothèse qu'il nous faudra peut-être postuler l'existence d'un «espace supérieur», qui autoriserait «une liberté de mouvement en quatre dimensions» et justifierait ces apparentes pénétrations.

Les derniers esprits frappeurs d'Amérique

Au cours des dernières années, il a été fait état de plusieurs cas d'esprits frappeurs aux Etats-Unis. On les étudie notamment, depuis 1961, à la Fondation pour la recherche psychique de Durham, en Caroline du Nord, dirigée par W. G. Roll. Le premier cas fut celui des perturbations de Seaford dans Long Island, au sujet desquelles une enquête a été menée conjointement par J. G. Pratt et Roll alors qu'ils travaillaient au Laboratoire de parapsychologie de l'université de Duke. Ce laboratoire, dirigé par J. B. Rhine, est devenu la Fondation pour la recherche sur la nature de l'homme. Les deux fondations continuent de coopérer en matière d'esprits frappeurs et pour d'autres études. Pratt président de la Fondation pour la recherche psychique fait désormais partie du département de parapsychologie de l'université de Virginie.

Famille 2M. et Mme James Herrmann  et leurs deux enfants

La maison de Seaford, habitée par M. et Mme James Herrmann  et leurs deux enfants, James et Lucille, âgés respectivement de douze et treize ans, a été le théâtre d'étranges incidents qui débutèrent en février 1958 et se poursuivirent durant cinq semaines. L'entité ou l'énergie inconnue se livre à un bouleversement en règle des objets de la maison, faisant voler plats et statuettes, renversant des meubles et, à de nombreuses reprises, des bouteilles qui perdaient leur bouchon en provoquant des explosions sonores, se renversaient et répandaient leur contenu. Ces bouteilles avaient toutes des bouchons à vis et renfermaient des produits ordinaires comme de l'amidon liquide, de l'eau de Javel ou des médicaments. Mme Herrmann exposa des bouteilles emplies d'eau bénite pour écarter l'intrus invisible, mais elles aussi furent touchées. L'une de ces séances de «débouchage» se produisit alors que J. G. Pratt et W. G. Roll étaient présents. Alors qu'ils se trouvaient en haut avec la famille, ils entendirent un grand bruit d'explosion et découvrirent dans la cave une bouteille d'amidon sens dessus dessous dans sa boîte; le bouchon à vis gisait à terre un peu plus loin. Personne ne se trouvait à la cave au moment de l'incident et les deux parapsychologues furent incapables d'en fournir une explication normale. Pensant que les bouteilles pouvaient contenir un gaz susceptible de faire sauter les bouchons, les enquêteurs tentèrent d'obtenir ce résultat avec d'autres bouteilles. Or tantôt l'accumulation de gaz provoquait l'explosion de la bouteille, tantôt la pression se libérait par le filetage du bouchon; mais, en aucun cas, celui-ci ne se dévissait de lui-même. Au début, la famille avait fait appel à la police dans l'espoir de la voir résoudre ce mystère et celle-ci avait procédé à l'analyse des bouteilles pour vérifier si elles ne contenaient pas des substances étrangères. On n'en trouva point. Une fois, alors qu’un policier était avec la famille dans la salle de séjour et que personne d'autre ne se trouvait dans la maison, il se produisit une «valse» des bouchons dans la salle de bains et différents déplacements d'objets. Alors qu'une parente en visite se trouvait dans le living avec les deux enfants, elle vit une statuette de porcelaine posée sur la table commencer à «s’agiter», puis faire un bond de 60 cm dans la pièce pour aller atterrir avec fracas sur le tapis sans toutefois se briser. Au même instant elle put observer James, tranquillement assis, les bras croisés, au milieu du divan.

James hermannJames Herrmann

On ne tarda pas à se rendre compte que James était au centre des perturbations. En mesurant les distances que parcouraient les objets par rapport à l'endroit où se trouvait le garçon, on s'aperçut que le nombre des incidents diminuait en fonction de l'éloignement de l'enfant. Ce trait a été observé par la suite dans de nombreux cas de poltergeists. Aussi étranges que soient ces phénomènes, ils semblent tous régis par les mêmes types de lois que les phénomènes énergétiques connus: plus on s'éloigne de la source d’énergie et plus elle devient faible.

Le 6 mai 1961, jour anniversaire d’Ernest Rivers, certaines perturbations se produisirent dans l'appartement que ce garçon de treize ans partageait avec sa grand-mère à Newark, dans le New Jersey. Parmi les soixante incidents que l'on put enregistrer pendant les deux mois suivants, le plus intéressant se produisit au moment où Charles D. Wrege, un assistant à l'université, procédait à une enquête. Un soir, alors qu'il était seul avec l'enfant dans la cuisine, il entendit un grand bruit de chute dans la salle de séjour voisine. On y trouva une grosse lampe de faïence en mille morceaux sur le parquet à environ un mètre de la table où elle était habituellement posée. Au moment où l'incident se produisit, Wrege, qui était occupé à donner un coup de téléphone, tenait l’appareil d'une main, l'autre étant posée sur l'épaule d'Ernest. Il pouvait donc parfaitement contrôler le garçon. Il n’y avait personne d'autre dans l'appartement et on ne découvrit aucune trace de ficelle ni d'autres moyens mécaniques grâce auxquels on aurait pu «monter» l'affaire. D'autres phénomènes se produisirent en présence de visiteurs qui surveillaient l'enfant.

Dans l'espoir que les incidents cesseraient si on éloignait Ernest, celui-ci alla habiter chez un oncle et tout rentra dans l'ordre. Au mois de septembre, en présence de W. G. Roll, Ernest revint et les vols d'objets reprirent. La grand-mère voulait faire quitter l'appartement à l'enfant mais Roll, dans l'espoir d'observer les phénomènes dans de bonnes conditions, insista pour qu'il restât. Personne n'avait été blessé par des objets en présence de Roll, ainsi que le fit observer ce dernier à la grand-mère. «Cela ne fait pas de mal aux gens», dit-il. Au même moment, un petit flacon, parti d'une table proche du divan, vint le frapper en pleine tête. Ernest était assis à côté de la table et Roll ne put jurer que ce n'était pas l'enfant qui avait lancé la bouteille. Plus tard, on vit effectivement le garçon jeter des objets, bien qu'il le niât. Interrogé sous hypnose et soumis à l'épreuve du polygraphe, il maintint ses dénégations. Curieusement l'enregistrement du polygraphe n’indiqua aucune des réactions émotionnelles normalement associées au fait de mentir. Il semblerait que l'enfant n'ait pas été plus conscient de jeter des objets qu’il ne l'avait été des autres phénomènes dont il n'était pas l'auteur. Dans d'autres cas d'esprits frappeurs, des phénomènes apparemment inexplicables se sont révélés par la suite être simplement des manœuvres frauduleuses. Les examens psychologiques et psychiatriques pratiqués sur Ernest fournirent cependant une explication plausible. Comme les autres individus victimes d'esprits frappeurs, Ernest éprouvait de violents sentiments de colère qu’il ne pouvait exprimer normalement. Ceux-ci étaient spécialement dirigés contre sa grand-mère. Au moment où le garçon perdit ses pouvoirs psychokinétiques, il continua à provoquer les mêmes phénomènes par une voie normale, car ceux-ci lui permettaient d'extérioriser son agressivité vis-à-vis de son aïeule. Avec la collaboration des services de pédiatrie de Newark, on envoya provisoirement Ernest dans une famille d'accueil et les phénomènes d'esprit frappeur, authentiques ou provoqués, cessèrent.

Une manifestation très inhabituelle d'esprit frappeur a été observée naguère à Indianapolis, au cours des mois de mars et avril 1962. On n'enregistra pas seulement des déplacements et des bris d'objets, mais les membres de la famille subirent d'étranges morsures et blessures sur diverses parties du corps. Ce foyer comptait trois personnes: une fille de treize ans, sa mère et sa grand-mère. Cette fois, ce n'était pas la fille mais la mère qui paraissait être au centre des désordres, les morsures étant généralement réservées à la grand-mère. Le cas fit l'objet d'une enquête de W. G. Roll. À plusieurs reprises en sa présence, la grand-mère poussa des cris et exhiba des traces toutes fraîches de piqûre sur les bras, la poitrine et d'autres parties du corps, parfois avec écoulement de sang. Roll se mit en quête d'insectes ou d'ustensiles susceptibles d'avoir pu causer ces blessures, mais il ne trouva rien. Au total, l'aïeule fut atteinte à quatorze reprises et sa petite-fille une fois; le nombre des piqûres allait, à chaque attaque, de une à huit. Il était impossible qu’un animal de la taille d'un insecte ou même plus grand pût provoquer toutes ces blessures sans qu'on l'eût découvert; par contre, on ne pouvait exclure que la victime se les fût infligées elle-même. Quand les blessures cessèrent, d'étranges bruits de coups se firent entendre dans le voisinage de la vieille dame. À un moment où Roll et un psychologue qui prêtait son concours à l'enquête se trouvaient présents, et alors que ce dernier tenait la main de la grand-mère pour l'empêcher de frapper contre le mur, les mêmes bruits tout proches se firent entendre. Roll, en compagnie de la mère pouvait contrôler la chambre de la petite-fille. Aucune personne présente ne pouvait avoir donné ces coups d'une façon normale. Il y en eut en tout vingt-cinq séries qui effrayèrent et troublèrent la famille notamment la grand-mère. On enregistra également, pendant celle période septante-six (soixante-seize) déplacements d'objets. Un jour, alors que la grand-mère et la petite fille étaient dans leurs chambres et que la mère se trouvait dans le couloir à l'extérieur des pièces, une grande brosse à dos sortit de la salle de bains et traversa le couloir jusqu'à l'escalier tandis que Roll surveillait la mère et tenait à l'œil, en même temps, les portes des autres chambres.

Parmi les esprits frappeurs qui donnèrent lieu aux enquêtes les plus complètes, il faut citer le cas d'une personne prise d'accès de rage dans un lieu de prédilection des esprits frappeurs: un entrepôt rempli de verres, de cendriers, d'assiettes et autres objets fragiles. Les désordres - au total, plus de deux cents incidents - se produisirent en janvier 1967 dans un magasin de gros d'articles de nouveautés de Miami, en Floride. Les policiers, un magicien et d'autres spécialistes ne purent fournir aucune explication. J. G. Pratt et W. G. Roll enquêtèrent sur ce cas. On ne tarda pas à s'apercevoir que les incidents se concentraient à proximité d'un des employés, Julio,  dix-neuf ans, travaillant au service des expéditions. Dans certaines parties de l'entrepôt, les désordres étaient plus fréquents et c'est sur elles que se porta l'enquête. Les enquêteurs désignèrent des secteurs déterminés et y placèrent des objets en espérant qu’ils seraient affectés par les incidents, tandis que Julio et les autres employés demeuraient sous surveillance. Dans plusieurs cas, les objets tombèrent effectivement sur le sol, alors que Julio et les autres continuaient d'être surveillés. Pour tenter de découvrir les facteurs physiologiques ou psychologiques susceptibles d'être en rapport avec ces phénomènes, Julio vint à Durham pour y subir des tests et être soumis à des observations. On ne lui trouva aucune anomalie physique et son électro-encéphalogramme était normal. Comme dans d'autres cas semblables, les tests psychologiques révélèrent de vifs sentiments d'hostilité, particulièrement envers ses père et mère, que Julio ne pouvait exprimer ouvertement et qu’il estimait d'ailleurs ne pas éprouver personnellement. Il apparut qu’il assimilait les propriétaires de l'entreprise de Miami à ses parents et que ces incidents étaient un moyen d'extérioriser une agressivité qui ne pouvait trouver d'autre issue.

Alors qu'il était à Durham, le jeune homme fut testé, à l’invitation de J. B. Rhine, à l'aide d'instruments de mesure de psychokinésie dont disposait la Fondation pour la recherche sur la nature de l'homme. Des résultats significatifs furent obtenus sur une machine à lancer automatiquement les dés. On constata en outre une apparente agitation de nature PKSR sur un vase placé dans un couloir à proximité de Julio et des parapsychologues.

En novembre 1968, un esprit frappeur mit, pour ainsi dire, à sac la petite maison d'un couple âgé dans le village d’Olive Hill, dans les monts Cumberland du Kentucky. Presque tous les objets cassables finirent en pièces sur le plancher. Le vieux couple déménagea, mais en vain car les incidents ne tardèrent pas à se reproduire à leur nouveau domicile. En décembre, une enquête fut entreprise par W. G. Roll et J. P. Stump. Un jour où ce dernier se trouvait dans la salle de séjour, face à la télévision, un vase et un petit napperon tombèrent soudain derrière le poste, suivis lentement par les fleurs en plastique qui garnissaient le vase. Au même moment une pendulette qui, elle aussi était sur le poste, franchit plus d'un mètre dans la direction opposée pour venir atterrir aux pieds de Stump. Quand celui-ci alla ramasser les autres objets, il découvrit le vase sur le napperon et les fleurs dans le vase, exactement dans la position qu'ils occupaient sur le poste. Le petit-fils du vieux couple, Roger, un garçon de douze ans, était là, le dos tourné au poste de télévision, sous les yeux de l'enquêteur. Il se trouvait généralement dans le voisinage lors des incidents. À une occasion, cependant, un flacon de parfum placé sur une commode de la chambre à coucher franchit un peu plus d'un mètre pour venir tomber sur le plancher, Roll, face à la commode, étant la personne la plus proche de ce meuble; Roger se trouvait dans une autre pièce. Une autre fois, Roll ayant suivi l'enfant dans la cuisine, la lourde table de cuisine bondit en l'air, vira d'environ 45 degrés et vint se poser sur le dos des chaises installées autour d'elle. Roll, qui regardait le garçon qui se tenait près de la table, ne vit pas comment il aurait pu provoquer l'incident par des moyens normaux. Il n'y avait personne d'autre dans la cuisine.

Il se produisit en tout cent septante-neuf (cent soixante-dix-neuf) incidents, la plupart en présence de l'enfant. Ce cas constituait un témoignage particulièrement intéressant, car plusieurs des phénomènes avaient pu être directement observés sur place par les enquêteurs. Comme dans d'autres cas d'esprit frappeur, on constata une nette régression du nombre des incidents lorsque l'enfant s'éloignait ce qui laisse à penser, une fois de plus, que cette forme d'énergie obéit d'une certaine manière à des lois connues.

 

Astral 2000 - Gérard - Mai 2018

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