Les kurdaitcha australiens

Mots-Clés : Kurdaitcha,Australie,os pointé,kundela,sorcier,Kinjika,maléfice

Aborigenes

Aborigènes

Introduction

Depuis les temps de l'Égypte et de la Mésopotamie anciennes jusqu'à nos jours, en Haïti, en Australie ou en Afrique, des gens en pleine santé sont tombés malades et sont morts parce qu'on leur avait jeté un sort.

Il y a de nombreuses manières de jeter des sorts, mais on peut, par exemple, façonner une effigie de la victime et la cribler d'épingles ou la brûler; l'effigie peut être en cire, en bois, en argile, en chiffons ou en paille. Des incantations ou des chants peuvent aussi jeter un sort. Des pierres ou des armes «chargées» de magie, ou bien des objets contenant des poudres ou des herbes aux pouvoirs maléfiques, servent au même dessein.

Bien que les méthodes diffèrent, la magie opère si l'on croit suffisamment en sa puissance. Le sorcier doit avoir une confiance absolue en son pouvoir; la victime, être convaincue de son infaillibilité, et la société en général, adhérer à ces croyances. Ce dernier point est particulièrement important. On imagine l'effet produit, dans les cultures où la communauté considère la victime comme morte à partir du moment où elle sait qu'un sort lui a été jeté. Il arrive au condamné de cesser de boire et de manger, ce qui concourt à hâter sa fin.

Les kurdaitcha

Une méthode bien connue d'exécution rituelle est celle de I' «os pointé», utilisée par les aborigènes d'Australie. La victime ne subit aucun contact matériel, mais son destin est aussi sûrement scellé que si on lui transperçait le cœur d'une lance.

L'arme avec laquelle on vise la victime est généralement un os. Celui-ci peut être celui d'un homme, d'un kangourou ou d'un émeu; parfois, il peut aussi être en bois ou en pierre. Le modèle varie d'une tribu à l'autre. Il mesure en général quinze à vingt-deux centimètres de long; il est pointu à une extrémité et bien lisse. A l'autre extrémité, une tresse de cheveux est attachée à un trou ou collée avec une gomme provenant d'une graminée, le triodia. Le kundela, ainsi nommé, doit être chargé d'une puissante énergie psychique, au cours d'un rituel complexe qui doit être scrupuleusement suivi et dont le secret n'est divulgué ni aux femmes ni aux étrangers à la tribu. Si le « condamné » s'est enfui, l'arme est remise aux kurdaitcha, les tueurs rituels de la tribu.

Kundela

Faits d'os et de cheveux humains, soigneusement façonnés, ces kundela servent,

selon un rite des aborigènes d'Australie, à «pointer» un sort mortel sur un condamné

Ces hommes tiennent leur nom des sandales qu'ils portent pendant leur chasse à l’homme; elles sont tissées de plumes de cacatoès et de cheveux humains, et ne laissent pratiquement pas d'empreintes.

Les tueurs se couvrent le corps de poil de kangourou, collé sur leur peau enduite de sang humain, et ils portent un masque en plumes d'émeu. Ils opèrent à deux ou trois. Implacables, ils poursuivent leur gibier humain pendant des années s'il le faut.

Quand ils ont enfin repéré leur proie, ils s'en approchent à une distance d'environ cinq mètres et le «frappeur», un genou en terre, vise le condamné comme avec un pistolet. L'homme traqué est alors glacé de terreur. Le kurdaitcha lance l'os dans sa direction, en émettant un chant bref et perçant. Après avoir récupéré l’arme, les chasseurs se retirent, abandonnant leur victime à son triste sort. Lorsqu'ils sont de retour dans leur village, les kurdaitcha brûlent le kundela de façon cérémonielle.

Le condamné peut survivre quelques jours, voire quelques semaines. Mais sa famille et les membres des autres tribus (qui auront certainement appris son « exécution »), convaincus du pouvoir mortel du kundela, le traitent comme s'il était déjà mort.

Le chargement rituel du kundela fait de cet os une arme psychique, une « lance de la pensée », comme on l'a appelé, qui transperce le condamné quand elle est pointée sur lui. La victime, une fois « blessée », est vouée à une mort aussi certaine que si une lance l'avait frappée en plein cœur.

Il semblerait que, dans les sociétés où les effets d'un maléfice sont unanimement tenus pour assurés, il soit hors de doute que la « lance de la pensée » ait le pouvoir de tuer.

Kurdaitcha australien

Kurdaitcha australien

Dans son livre sur les aborigènes d’Australie, publié en 1925, le Dr Herbert Basedow décrit l'effet du rite de l’ «os pointé» :

« L'homme qui découvre qu'un ennemi est en train de pointer un os sur lui offre un spectacle pitoyable. Il se tient hagard, les yeux fixés sur la pointe meurtrière, les mains levées comme pour se protéger des effluves mortels qu'il imagine se déverser dans son corps. Il blêmit, son regard devient vitreux, et ses traits se déforment horriblement... Il veut crier, mais les sons s'étranglent dans sa gorge; il ne peut qu'écumer. Il se met à trembler de tout son corps, et ses muscles se nouent involontairement. Il recule en chancelant et s'écroule sur le sol. Pendant un moment, il paraît évanoui, mais, peu après, il se contorsionne, comme en proie à une atroce agonie, et, se couvrant le visage de ses mains, il se met à gémir. Au bout de quelque temps, il semble plus calme, et il rampe jusqu'à son wurley, ou cabane. À partir de cet instant, il dépérit, il s'agite, il refuse de se nourrir et se tient à l'écart des travaux quotidiens de la tribu. À moins qu'un secours ne lui soit apporté sous la forme d'un contre-maléfice, administré par le nangarri, ou sorcier-guérisseur, sa mort n'est plus qu'une question de temps, relativement court. Si le sorcier-guérisseur intervient en temps opportun, il se peut que le condamné soit sauvé ».

Réactions physiologiques ?

À ces réactions de la victime devant l' « os pointé » sur lui, on a proposé une possible explication physiologique. Les effets sur l'organisme d'une forte peur sont analogues à ceux d'une colère violente, les glandes surrénales augmentent leur production d'adrénaline, réduisant l'irrigation sanguine dans les parties du corps moins essentielles, pour privilégier les muscles, dont la vie du sujet, par la fuite ou par le combat, peut dépendre. L'adrénaline produit cet effet par une constriction du calibre des vaisseaux sanguins dans les parties du corps capables de survivre temporairement avec une moindre irrigation.

Cet avantage n'est toutefois acquis qu'à un certain prix. La diminution de l'irrigation sanguine s'accompagne de celle de l'apport d'oxygène transporté par les globules rouges. Privés en partie d'oxygène, les capillaires sanguins deviennent plus perméables au plasma sanguin, qui s'infiltre dans le tissu entourant ces vaisseaux. Il en résulte, au cours d'un état prolongé de peur ou de colère, une réduction généralisée du volume de la circulation sanguine.

Cette réduction entraîne à son tour celle de la pression du sang, et un cycle potentiellement désastreux peut s'installer : la réduction de la pression sanguine affecte les organes qui assurent la circulation du sang, et l'appauvrissement de la circulation réduit encore plus la pression sanguine. Faute d'une intervention, cet enchaînement peut être fatal.

Oui, mais …

Qu'un sort ou un maléfice puisse provoquer de tels désordres est déjà mystérieux en soi, mais plus étonnants encore sont les cas de décès survenant alors que les examens médicaux n'ont révélé ni réduction de la pression sanguine ni accumulation anormale de globules rouges. Tel est le cas de Kinjika, de la tribu des Mailli, dont voici l'histoire : en 1953, un aborigène nommé Kinjika fut transporté par avion de son Arnhem Land natal (Territoire du Nord), en Australie, jusqu'à un hôpital de Darwin. Il n'était ni blessé, ni empoisonné, ni atteint de maladie connue, mais il se mourait. A l'hôpital, il survécut quatre jours dans de grandes souffrances, et il mourut le cinquième, victime d'un os « pointé » sur lui, méthode d'exécution ou de meurtre, sans trace et presque toujours infaillible. 

L'homme avait appartenu à la tribu des Mailli, et il avait violé une de ses lois régissant l'inceste. Convoqué devant une assemblée tribale de jugement, il ne s'était pas présenté et avait été condamné à mort par contumace. Kinjika avait fui sa patrie, et l'exécuteur de la tribu, le mulunguwa, avait façonné et rituellement « chargé » l'os de la mort, le kundela.

Tel est aussi le cas d'un Canaque du Queensland du Nord, en Australie, relaté par le Dr P. S. Clarke : il était sûr de mourir bientôt, car on lui avait jeté un sort; le médecin l'examina et ne décela chez lui aucun problème médical; mais, quelques jours plus tard, il était mort…

Ref/ : (john Godwin, Unsolved The World of the Unknown, p. 163-176; Ronald Rose, Living Magic, p. 30-36.)

 

Une autre hypothèse : les réactions psychologiques

Dans cet article, nous avons donné une probable explication physiologique, étayant le processus qui conduit à la mort de la personne visée.

Du point de vue psychologique, nous savons que l’ « effet placebo » peut apporter un mieux, voire une guérison, après absorption de « médicaments » factices ou de pratiques de « médecines » parallèles ou douteuses.

Dans les cas d’envoûtement, d’ensorcellement, de sorcellerie, etc. serait-il possible que nous nous trouvions en présence d’ « effets nocebo » ? Si tel est le cas, à l’inverse de l’effet placebo, cet effet nocebo ferait-il réagir de façon nocive la victime, provoquant ainsi des troubles négatifs importants qui pourraient aller jusqu’à sa mort ?

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Astral 2000 - Gérard - Août 2018

 

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