Les Dragons
Dracologie - Dragonologie
Mots-Clés : dragon,dracologie,dragonologie,saint Georges
Dragon bleu
Pour les Celtes comme pour les Romains, le dragon était un symbole guerrier. L'emblème de l'empire d'Orient était un dragon pourpre : l'écrivain romain Marcellinus a raconté comment Constantin était entré dans Rome, à la tête de cohortes qui portaient des enseignes frappées de dragons : « Le vent agitait ces enseignes comme si les dragons avaient été vivants et prêts à semer la destruction ».
Chez les Celtes, Uther Pendragon, le père du roi Arthur, avait adoptè pour emblème le dragon '' Y Ddraig Coch '', dit « le Rouge ». Uther avait vu en songe un dragon traverser le ciel en jetant des flammes. Ses devins avaient vu là un présage selon lequel il devait hériter du royaume de son frère.
Cet espoir allait se réaliser et Uther fera alors confectionner deux magnifiques étendards représentant des dragons. L'un d'eux sera remis à la cathédrale de Winchester. L'autre le suivra partout dans les batailles, comme un talisman autant que comme un gage de puissance et de bonne fortune dans les combats.
Dans la littérature celtique, le mot « dragon » désigne également un chef. Un pendragon est un chef suprême, élu pour faire face dans les périodes de danger ou de troubles. Cette connotation sémantique n'est sans doute pas dénuée de tout lien avec les nombreuses légendes de dragons qui circulent près de la frontière du pays de Galles : les dragons en question pourraient tout simplement n'être que de vulgaires chefs de bandes de pillards gallois ...
Avec la légende de saint Georges, le dragon entre dans l'épopée de la chevalerie vierge. La veille de l'arrivée du chevalier, la propre fille du roi a été désignée pour subir son triste sort. Elle attend, résignée et parée de ses plus beaux bijoux, la venue de son hideux ravisseur.
Évidemment, le sang du jeune et beau chevalier ne fait qu'un tour. Fier d'ajouter un nouveau coup d'éclat à la liste de ses hauts faits, il se propose de délivrer la jeune fille. Celle-ci le supplie en pleurant d'abandonner cette idée : seule sa mort peut sauver le royaume de son père ! Le chevalier insiste et se prépare à affronter le dragon en combat singulier.
Il finira par le transpercer de son épée ou du fer de sa lance. Désormais, les immenses trésors enfermés dans l'antre du monstre sont à lui. Il les donne au roi, dont il épouse la fille. Tout le royaume est en liesse ...
Saint Georges terrassant le dragon - Hans Von Aachen
Voilà pour l'archétype. Les détails varient en fonction des régions, de l'auteur ou ... des contraintes imposées par le 7ème art !
La tradition orthodoxe rattache la légende de saint Georges à celle de Persée, le héros grec qui aurait délivré la princesse éthiopienne Andromède des griffes du monstre marin qui la menaçait. Pour les chrétiens, c'est la Foi qui est symbolisée par le preux chevalier. Celui-ci sauve l'Église, personnifiée par la princesse, des démons du paganisme, représentés par l'horrible dragon. Précisons enfin que, pour les disciples de Freud, cette légende est connotée d'une manière infiniment plus érotique ...
Jusqu'ici, nous n'avons évoqué que les dragons épiques et ceux des grandes légendes. Il en existe pourtant de plus modeste apparence, qui prennent la forme de serpents ou de vers enchantés.
Ainsi, le dragon de Loschy Hill ou le « ver de Lambton », qui avait le pouvoir - commun, en fait, à tous les vers - de se reconstituer si on le coupait en morceaux. Pour parvenir à les détruire, il fallait l'aide d'un chien, qui s'emparait des tronçons et les emportait au loin pour les empêcher de se ressouder. Malheureusement, le plus souvent, l'haleine empoisonnée du dragon était fatale à l'animal !
" La crypte du dragon " - Le film
Au XIIème siècle, le « ver de Linton » a semé la terreur dans une petite paroisse écossaise : il massacrait le bétail aussi bien que les gens. Il sera tué par un chevalier nommé Sommerville de Lariston, au moyen d'un stratagème original. Le chevalier astucieux enfilera sur sa lance un bloc de tourbe trempé dans de la poix enflammée. Ce brûlot improvisé embrasera les entrailles du dragon. Les profonds sillons circulaires que l'on voit encore sur les flancs de la colline de Wormington auraient ainsi été creusés par les sursauts de ce ver à l'agonie.
Dans le seul folklore britannique, on compte plus de cinquante dragons différents. Dans le monde entier, on en recense des milliers d'autres. Une Histoire naturelle, publiée en 1776, mentionne le dragon comme un « animal des plus redoutables et probablement d'origine surnaturelle ».
Peut-être l'auteur avait-il en mémoire le fameux « serpent de l'Essex », tué une centaine d'années auparavant, qui est représenté sur une sculpture de l'église de Henham. Un bois gravé de l'époque le reproduit également et nous montre une créature dépourvue de membres et recouverte d'une peau écailleuse, bosselée et verruqueuse comme celle d'un crapaud. L'animal, qui mesurait près de 3 m, avait été tué par une bande de paysans.
Dragon diamant - Art chinois
Dans le Manuscrit Bowes du British Museum, on raconte aussi comment le « dragon de Sockburn » a terrorisé un village du comté de Durham, à l'époque saxonne : « Sir John Conyers détruisit cette vermine monstrueuse et empoisonnée, qui a fait périr tant de personnes par son souffle pestilentiel... »
Les esprits soucieux de rationalisme ont tenté de trouver des explications satisfaisantes pour justifier l'existence de ces dragons. Pour certains, le terme « dragon » pourrait n'être qu'une métaphore désignant une crue spectaculaire de la rivière Tees voisine. Pour d'autres, il serait une allusion aux incursions des pirates Vikings, dont les drakkars étaient souvent décorés de proues en forme de dragons.
Il est curieux de constater que le mot « dragon » a toujours plusieurs interprétations, dont aucune n'est entièrement satisfaisante. Pour ce qui est du « dragon de Sockburn », combat-on une crue? Les Vikings avaient-ils une haleine empoisonnée?
Même en supposant que des créatures aussi hideuses et fantastiques aient existé, comment expliquer que des êtres tellement énormes aient pu voler? D'après les documents en notre possession et d'après les récits légués par la tradition, on peut estimer le poids moyen des dragons à environ 9 tonnes. Si l'on se réfère aux plus puissants des animaux volants actuels (comme le bourdon, qui peut soulever dans les airs un poids de 170 g par centimètre carré de surface d'aile !), il aurait fallu à ces dragons une envergure de près de 180 m. Ce qui est impensable ...
Il existe une autre piste, qui relie le problème des dragons à celui des dirigeables : comme les Zeppelins, il est possible que les dragons aient été « gonflés » à l'air chaud ou à tout autre gaz plus léger que l'air ! Il leur fallait donc un corps énorme pour emmagasiner tout le gaz nécessaire à leur ascension. Et ils n'avaient plus tellement besoin d'ailes, sinon pour se diriger en l'air.
Certains auteurs ont ainsi imaginé que l'intérieur du corps des dragons devait être une sorte de gigantesque laboratoire chimique : l'acide chlorhydrique, présent dans le tube digestif de tous les vertébrés, s'y serait attaqué au calcium des os pour produire de l'hydrogène, gaz plus léger que l'air et facilement inflammable. Pour régénérer les os, il suffisait aux dragons d'avaler des pierres calcaires !
Toujours dans cette hypothèse, assez drôle à défaut d'être réaliste, le métabolisme des dragons ne devait pas se ralentir. Pour libérer les excès d'hydrogène survenant après une période de repos, les dragons devaient le brûler à l'extérieur, par un jet de flammes.
Pour ce qui est de la toxicité du sang, de la prédilection des dragons pour les trésors et pour les jeunes vierges, les explications n'ont pas manqué.
Suprême argument, qui justifie le fait que personne n'a jamais vu de dragons fossiles : à la mort du dragon, le processus de « digestion des os », parfaitement contrôlé jusque-là, se poursuivrait spontanément, ce qui détruirait la totalité du squelette du monstre.
On retrouve cette hypothèse d'anéantissement spontané dans un rapport d'enquête effectué en 1968, en Irlande. Trente ans auparavant, un « monstre » avait été découvert dans une grotte, près du lough Derrylea, dans le comté de Clare.
Un villageois devait déclarer à l'enquêteur : « La chose était prisonnière, là, et ne pouvait pas s'échapper. Avant qu'on ait pu parvenir jusqu'à elle, elle avait tout simplement disparu, comme si elle s'était évanouie en fumée ... »
Que sont donc ces dragons ? A défaut de créatures mythiques, ne peut-on les confondre avec ... des éléphants ? Ou avec ... des alligators ? Ne seraient-ils pas, d'autre part, des survivants de ces grands monstres de la préhistoire ? Cet incroyable débat a beaucoup passionné tous les naturalistes des siècles précédents ...
ASTRAL 2000 - Gérard - Octobre 2017